Jacques Insermini, ou les 50’s rugissantes

Jacques Insermini était le doyen français des pilotes de vitesse. Il est décédé le 6 juin 2024 à l’âge de 96 ans. La moto française a perdu avec lui un pionnier des Grands Prix et un personnage hors du commun.

Né le 24 octobre 1927 à Paris, Jacques Insermini était destiné à une carrière sportive malgré sa formation de mécanicien. Gymnaste prometteur mais aussi recordman de France en haltérophilie, il opta pour la moto au lendemain de la Libération, charmé par les Harley-Davidson des GI’s américains. A la fin des années 40, il s’achète une Jonghi 250 mais dispute sa première course au Bois de Boulogne au guidon d’une Triumph Tiger 100 d’emprunt. Il remporte son premier succès sur une AJS 7R prêtée par Jean Murit. Son grand gabarit le pousse naturellement vers les grosses cylindrées. En 1952, il participe au GP de Casablanca, où il inscrit sa Norton Manx en catégories 500 et side-cars, deux quatrièmes places à la clé.

Ses bonnes performances sur les courses inter lui permettent de décrocher le soutien d’un “sponsor”, Reg Dearden, réputé comme le meilleur préparateur de la célèbre Manx qui constitue alors l’essentiel des plateaux.

Avec ses monos Norton 350 et 500, Insermini écume les circuits du Continental Circus où il se lie d’amitié avec Jacques Collot, l’un des premiers français à monter sur un podium de GP500, mais aussi les futurs champions du monde Mike Hailwood et Gary Hocking. La place d’Insermini est plutôt en milieu de grille, à une époque où seuls les six premiers pilotes marquent des points. « Je faisais 90 kg et me battais contre des pilotes qui en faisaient 20 de moins », aimait-il rappeler. « Mais si je faisais un régime, je pilotais moins bien car la vie sur le Continental Circus était très fatigante. » “Les trois gros”, avait-il d’ailleurs l’habitude de surnommer la bande de fêtards qu’il formait sur les circuits avec ses amis Jacques Collot et Guy Ligier.

Insermini a néanmoins décroché cinq titres de Champion de France, deux en 350 (1960 et 62), et trois en 500 (1960, 61 et 62).

En 1962, Jacques Insermini quitte sa compagne Nanou, qu’il confie aux bons soins de Jack Findlay (il donnera en prime à l’Australien quelques coups de mains pour la mécanique), en même temps que la compétition moto, malgré un bref retour au Bol d’Or 1969 sur une Moto Guzzi engagée par Jean Murit.

Brièvement pilote d’essai Lancia, Insermini dispute un Rallye de Monte-Carlo avant de se reconvertir dans le catch et la cascade de cinéma où il travaille entre autres pour Claude Lelouch. Le septième art lui ouvre des portes : celles de la publicité, où il incarne notamment Monsieur Propre, celle du cinéma de charme aussi. Grâce ses cachets, l’étalon se lance d’ailleurs dans ce qui sera sa dernière activité : l’élevage de chevaux. Depuis sa retraite, Jacques Insermini partageait sa vie entre Paris et la Côte d’Azur.